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Quelle sorte d’amoureux(se) ĂȘtes-vous


Pour les psychologues, les styles d’attachement romantique reprennent ceux existant chez l’enfant et ne font que les rĂ©actualiser de maniĂšre inconsciente. Si vous tombez toujours sur le mĂȘme genre de personne et vivez encore et encore le mĂȘme type de relation toxique, ce n’est donc pas un hasard. Mais ce n’est pas une fatalitĂ© et vous pouvez travailler Ă  changer les choses.

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La thĂ©orie de l’attachement de John Bowlby (1978) a marquĂ© un tournant en psychologie puisqu’elle dĂ©termine comment les ĂȘtres humains s’attachent aux autres et la maniĂšre dont ils construisent et vivent leurs relations avec d’autres humains. Pour construire sa thĂ©orie, Bowlby s’est intĂ©ressĂ© Ă  la nature du lien mĂšre-enfant. Son postulat phare : chacun d’entre nous a besoin de dĂ©velopper une relation d’attachement avec au moins une personne qui prend soin de lui de maniĂšre stable, cohĂ©rente et continue pour dĂ©velopper un dĂ©veloppement social et Ă©motionnel normal.

L’attachement possĂšde Ă  la fois Ă  une composante innĂ©e et une composante apprise. Il existerait ainsi un besoin primaire prĂ©sent chez tous les nouveau-nĂ©s de nouer un lien d’attachement avec celui ou celle qui deviendra sa figure d’attachement ou donneur de soin. Ce besoin, hĂ©ritĂ© de l’Evolution, correspond Ă  une nĂ©cessitĂ© de protection et de sĂ©curitĂ© propre Ă  l’espĂšce. Il se fonde sur cinq comportements donnĂ©s Ă  la naissance et permettant de nouer et maintenir le contact avec le donneur de soins : le sourire, la vocalisation, les pleurs, le comportement d’aggripement et la succion.

A partir de ce systĂšme innĂ© se dĂ©veloppe un schĂ©ma (ou type) d’attachement qui dĂ©pend cette fois de l’expĂ©rience et peut donc ĂȘtre diffĂ©rent entre les individus. Ce schĂ©ma d’attachement repose sur l’apprentissage des liens affectifs que le bĂ©bĂ© construit dans l’enfance auprĂšs de sa figure d’attachement (souvent la mĂšre, considĂ©rĂ©e par Bowlby comme la « base de sĂ©curitĂ© »). Si le schĂ©ma d’attachement se dĂ©veloppe tout au long de la vie, de nombreux travaux scientifiques ont pu montrer qu’il Ă©tait principalement jouĂ© dĂšs les premiers mois de la vie et qu’il existait une fenĂȘtre dite « sensible » pour qu’il se construise. Ainsi, des enfants privĂ©s de soins attentifs et continus peuvent se laisser dĂ©pĂ©rir et mourir.

Pour ce qui concerne les types d’attachement, deux ont principalement Ă©tĂ© identifiĂ©s. Si la figure d’attachement est disponible et apporte de la sĂ©curitĂ© affective Ă  son enfant, celui-ci dĂ©veloppera un attachement de type sĂ©curisant (ou sĂ©cure). En revanche, si cette figure n’apporte pas de sĂ©curitĂ© affective, l’individu dĂ©veloppera un attachement de type insĂ©curisant (ou insĂ©cure).

En rĂ©sumĂ©, mĂȘme si le systĂšme d’attachement se manifeste d’abord par des comportements innĂ©s permettant de rechercher la proximitĂ© affective, il s’étaye Ă  partir de modĂšles de reprĂ©sentations internes construits Ă  partir des expĂ©riences d’interactions du sujet avec sa figure d’attachement. Ces expĂ©riences vont donner lieu Ă  des croyances et Ă  des reprĂ©sentations concernant cette figure d’attachement. Elles se gĂ©nĂ©ralisent ensuite par « duplication » aux relations interpersonnelles avec lesquelles le mĂȘme schĂ©ma sera reproduit, y compris les relations amoureuses.

L'attachement chez l'enfant

A la suite de Bowlby, de nombreux chercheurs ont travaillĂ© sur l’attachement, et particuliĂšrement la psychologue Mary Ainsworth. GrĂące Ă  de nombreuses observations et Ă  la mise au point d’un protocole expĂ©rimental inĂ©dit (connu sous le nom de « situation Ă©trange »), elle a pu prĂ©ciser les types d’attachement et surtout montrer que le type insĂ©cure se scindait en trois schĂ©mas (ou styles) diffĂ©rents dĂ©terminant diffĂ©rentes modalitĂ©s d’attachement :

‱ Groupe A (attachement insĂ©cure Ă©vitant) : Il caractĂ©rise des enfants qui prĂ©sentent peu de manifestations affectives ou de comportements en direction de la base de sĂ©curitĂ©. Ces enfants paraissent peu affectĂ©s par la sĂ©paration, ont tendance Ă  Ă©viter la proximitĂ© et le contact avec la mĂšre lors des retrouvailles et se focalisent surtout sur les jouets prĂ©sents dans l’environnement. Si un Ă©tranger leur retire le jouet qu’ils manipulent, ils peuvent se raidir ou se dĂ©tourner. Dans cette catĂ©gorie, l’enfant n’a pas confiance dans la disponibilitĂ© de son donneur de soins. Il tente de contrĂŽler son anxiĂ©tĂ© face Ă  la sĂ©paration en abaissant le niveau de ses ressentis Ă©motionnels et en se dĂ©tournant de la mĂšre. Pourtant, le dĂ©sintĂ©rĂȘt ou l’indiffĂ©rence dans le lien d’attachement n’est qu’apparent puisqu’il traduit la volontĂ© de se dĂ©fendre face Ă  l’anxiĂ©tĂ© rĂ©sultant de la sĂ©paration d’avec la mĂšre. Les parents de tels enfants ont Ă©tĂ© montrĂ©s comme apportant souvent peu ou pas de rĂ©ponse Ă  l’enfant stressĂ©. Ses demandes sont accueillies par de l’agressivitĂ©, du rejet ou de l’indiffĂ©rence. Ils dĂ©couragent les pleurs et encouragent l'indĂ©pendance. Adulte, l’enfant peut ne garder qu’un nombre limitĂ© de souvenirs prĂ©cis de ses expĂ©riences d’attachement, dĂ©nier des expĂ©riences nĂ©gatives, voire idĂ©aliser les parents.

‱ Groupe B (attachement sĂ©cure) : Ces enfants peuvent manifester une forme de protestation lors des sĂ©parations, surtout lors d’une sĂ©paration stressante. Mais ils accueillent avec plaisir leur mĂšre lors de son retour, notamment en recherchant la proximitĂ©. AprĂšs avoir Ă©tĂ© rĂ©confortĂ©s, ils retournent ensuite jouer. Dans cette catĂ©gorie, l’enfant se montre donc confiant vis-Ă -vis du donneur de soins parce que ce dernier lui apporte un sentiment de sĂ©curitĂ©. Les parents de tels enfants ont Ă©tĂ© montrĂ©s comme rĂ©pondant gĂ©nĂ©ralement de façon constante et appropriĂ©e Ă  leurs enfants. Ils sont disponibles, cohĂ©rents, aimants. Devenu adulte, la personne est capable de faire une description dĂ©taillĂ©e et cohĂ©rente de ses expĂ©riences, positives ou nĂ©gatives. Elle est Ă  l’aise avec ses imperfections et celles de ses parents.

‱ Groupe C (attachement insĂ©cure ambivalent) : Ce sont des enfants qui expriment de la dĂ©tresse lors de la sĂ©paration, mais avec un mĂ©lange de recherche de contact et de rejet colĂ©rique, et il est difficile de les rĂ©conforter. De plus, le retour et le rĂ©confort de la mĂšre ne diminuent pas la dĂ©tresse de l’enfant. Ces enfants cherchent de maniĂšre importante Ă  attirer l’attention de leur figure d’attachement. PerturbĂ©s s’ils sont sĂ©parĂ©s d’elle, ils ne font pourtant pas mine de rechercher sa prĂ©sence. AprĂšs son retour lors d’une sĂ©paration, ils n’arrivent pas Ă  se calmer et Ă  s’intĂ©resser Ă  leur environnement, comme des jouets disposĂ©s dans la piĂšce. Ces enfants ont souvent des parents montrant une incohĂ©rence entre des rĂ©ponses appropriĂ©es et d'autres nĂ©gligentes. Les rĂ©actions de tels parents peuvent ĂȘtre imprĂ©visibles ; un mĂȘme comportement peut ĂȘtre accueilli avec de l’enthousiasme une fois, et de la colĂšre une autre fois. A l’ñge adulte, les souvenirs des enfants de ce groupe sont souvent vagues, et il peut y avoir beaucoup de colĂšre envers les parents.

‱ Groupe D (insĂ©cure dĂ©sorganisĂ©) : Cette modalitĂ© d’attachement a Ă©tĂ© ajoutĂ©e par Main en 1985. Elle caractĂ©rise des enfants dont on ne comprend pas les intentions. Leurs comportements apparaissent dĂ©sorganisĂ©s simultanĂ©ment ou dans leur succession. Ils peuvent par exemple se figer ou avoir des rĂ©actions contradictoires ou colĂ©riques, ou encore avoir des rĂ©ponses stĂ©rĂ©otypĂ©es lors du retour de la figure d’attachement. Ils ne se sentent pas en sĂ©curitĂ©, ni lorsqu’ils sont loin du parent, ni lorsqu’ils s’en approchent ; il en rĂ©sulte une image de soi nĂ©gative. Ces enfants ont souvent eu des parents maltraitants, ayant des comportements figĂ©s ou figeants, intrusifs ou nĂ©gligents, maniant la nĂ©gativitĂ©, cofondant les rĂŽles (l’enfant devient le parent et inversement), ou faisant des erreurs rĂ©guliĂšres de communication. A l’ñge adulte, le discours des expĂ©riences de l’enfance est souvent incohĂ©rent, contradictoire, incomplet.


L'attachement chez l'adulte

Chez l’adulte, on considĂšre les stratĂ©gies d’attachement sont comme des stratĂ©gies de rĂ©gulation Ă©motionnelle et de traitement de l’information Ă©motionnelle. Il semblerait donc qu’à partir de son expĂ©rience affective infantile avec sa figure d’attachement, l’individu construise sa capacitĂ© de faire face Ă  ses Ă©motions et Ă  les gĂ©rer. La stratĂ©gie sĂ©cure est ainsi considĂ©rĂ©e comme une stratĂ©gie de rĂ©gulation Ă©motionnelle Ă©quilibrĂ©e. Quant aux stratĂ©gies insĂ©cures, qui marquent un dĂ©rĂšglement dans le traitement et la rĂ©gulation des Ă©motions, on en distingue deux types :

- La stratĂ©gie d’hyperactivation (le type « prĂ©occupĂ© » dans l’attachement amoureux dont nous allons parler plus bas). Elle correspond au dĂ©bordement Ă©motionnel et Ă  l’incapacitĂ© de traiter des informations de maniĂšre adaptĂ© puisque l’individu est envahi par ses Ă©motions,

- La stratégie de désactivation (le type « détaché ») consiste à réprimer les émotions et à inhiber toute information de nature émotionnelle.


Ces stratĂ©gies de rĂ©gulation Ă©motionnelle, qui prĂ©sident Ă  la maniĂšre dont chacun noue et maintient des relations avec autrui, rĂ©actualisent les modĂšles d’attachement issus des expĂ©riences infantiles passĂ©es. Bowlby considĂ©rait dĂ©jĂ  que le systĂšme d’attachement fonctionne tout au long de la vie. L’adulte recherche ainsi continuellement dans son environnement actuel (qu’il soit amoureux ou amical) de la disponibilitĂ©, du rĂ©confort et un sentiment de sĂ©curitĂ©, tout comme il le faisait enfant avec ses parents. Ainsi, pour reprendre les termes de Shaver et Mikulincer (2002), les styles d’attachement adulte sont des « patterns systĂ©matiques d’attentes, de besoins, d’émotions, de stratĂ©gies de rĂ©gulation Ă©motionnelle et de comportement social qui rĂ©sultent de l’interaction du systĂšme d’attachement avec une histoire particuliĂšre des expĂ©riences d’attachement ».


L'attachement amoureux

Les psychologues Hazan et Shaver sont les premiers, en 1987, Ă  avoir proposĂ© une thĂ©orie de l’attachement spĂ©cifique de l’adulte dans ses relations amoureuses. Ils ont ainsi dĂ©veloppĂ© le concept « d’attachement romantique », partant du principe que l’attachement adulte se noue auprĂšs du partenaire amoureux au mĂȘme titre que l’attachement de l’enfant se construit auprĂšs de ses parents. Pour ces psychologues, le parallĂšle est Ă©vident : avec ses parents comme avec un partenaire amoureux, les ĂȘtres humains ont besoin de se sentir en sĂ©curitĂ©, de disponibilitĂ© et d’obtenir une rĂ©ponse appropriĂ©e lorsqu’ils se sentent en dĂ©tresse. Ils ont besoin de se sentir engagĂ©s et de contact. Ils se sentent en insĂ©curitĂ© lorsque le partenaire se rend inaccessible. Un couple a Ă©galement tendance Ă  partager un langage propre et qui n’appartient qu’à lui, ressemblant pour beaucoup parfois Ă  un « langage bĂ©bĂ© ».

Tous ces comportements et sentiments poursuivent les mĂȘmes objectifs : Ă©prouver un sentiment de sĂ©curitĂ© qui fait partie des besoins humains fondamentaux et parvenir Ă  une bonne rĂ©gulation des Ă©motions. Seule diffĂ©rence avec l’enfance : la sexualitĂ© qui est prĂ©sente dans la relation romantique alors qu’elle ne peut se concevoir au sein de la relation parent-enfant. D’aprĂšs Hazan et Shaver qui les ont Ă©tudiĂ©s, les comportements sexuels diffĂšrent en fonction des styles d’attachement amoureux : les personnes insĂ©cures ambivalentes (attachement romantique « prĂ©occupĂ© ») trouveraient davantage de plaisir dans la tendresse que dans la sexualitĂ©, alors que les personnes insĂ©cure-Ă©vitantes (attachement romantique « dĂ©tachĂ© ») rechercheraient davantage la sexualitĂ© et accepteraient davantage d’avoir des relations sexuelles en l’absence de sentiments.


Les styles d'attachement romantique

Compte tenu de la continuitĂ© du systĂšme d’attachement entre l’enfance et l’ñge adulte, Hazan et Shaver suggĂšrent que les mĂȘmes styles d’attachement devraient se retrouver aux deux Ă©poques. Aussi, les styles d’attachement romantique reprennent ceux existant chez l’enfant et se rĂ©partissent de la maniĂšre suivante :

- Attachement sĂ©cure (60% de la population) : il concerne les individus qui n’ont aucune difficultĂ© Ă  devenir intimes et Ă  faire confiance Ă  leur partenaire.

- Attachement Ă©vitant (20%) : il concerne les personnes qui souhaitent Ă©chapper Ă  la dĂ©pendance affective et qui Ă©vitent consciemment ou inconsciemment de s’engager dans des relations durables. Ces personnes Ă©prouvent des difficultĂ©s Ă  ĂȘtre proches des autres et n’apprĂ©cient pas non plus que l’on devienne trop intime avec elles. Le style Ă©vitant a Ă©tĂ© scindĂ© en deux styles d’attachement romantique : dĂ©tachĂ© et craintif (voir plus bas).

- Attachement ambivalent (20%) : il concerne les individus qui ont des demandes affectives dĂ©mesurĂ©es qui les mĂšnent Ă  la frustration ou Ă  des inquiĂ©tudes Ă  propos de la relation. Ils ont peur d’ĂȘtre abandonnĂ©s et remettent en question de maniĂšre incessante la sincĂ©ritĂ© de l’amour de l’autre. Cette attitude conduit souvent Ă  la jalousie, au soupçon, au contrĂŽle, voire Ă  la domination.


Ces thĂ©orisations ont conduit Ă  distinguer deux dimensions fondamentales de l’attachement romantique : l’anxiĂ©tĂ© et l’évitement dans la relation. La dimension de l’évitement renvoie Ă  la peur de l’intimitĂ© et de la dĂ©pendance, alors que la dimension de l’anxiĂ©tĂ© renvoie Ă  la peur de l’abandon. A partir de ces deux dimensions, quatre styles d’attachement amoureux ont Ă©tĂ© distinguĂ©s (voir tableau ci-dessous) :

- romantique sĂ©cure qui correspond Ă  l’attachement sĂ©cure de l’enfant,

- romantique préoccupé qui correspond au style ambivalent,

- romantique dĂ©tachĂ© qui correspond Ă  l’attachement Ă©vitant,

- romantique craintif qui correspond au Ă  l’attachement dĂ©sorganisĂ©-dĂ©sorientĂ©.

La distinction entre style dĂ©tachĂ© et craintif concerne les liens entre l’évitement et les modalitĂ©s de dĂ©fense : les personnes ayant un style dĂ©tachĂ© arrivent Ă  supprimer les pensĂ©es et les Ă©motions en dĂ©sactivant l’attachement tandis que les personnes ayant un style craintif Ă©chouent dans leurs tentatives de dĂ©sactivation et de dĂ©tournement de l’attachement.


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Les styles d’attachement romantique selon les deux dimensions d’évitement et d’anxiĂ©tĂ©. L’évitement renvoie Ă  la peur de l’intimitĂ© et de la dĂ©pendance ; l’anxiĂ©tĂ© renvoie Ă  la peur d’ĂȘtre abandonnĂ©.

‱ Style romantique sĂ©curisĂ© (Ă©vitement et anxiĂ©tĂ© faibles) : ce style caractĂ©rise des individus trĂšs confiants dans les relations intimes et recherchant la proximitĂ© affective du partenaire. Tout en considĂ©rant le couple comme une base de sĂ©curitĂ© solide, ils peuvent ĂȘtre trĂšs autonomes et n’ont pas besoin d’ĂȘtre rĂ©assurĂ©s en permanence sur l’amour de leur partenaire.


‱ Style romantique dĂ©tachĂ© (Ă©vitement Ă©levĂ© et anxiĂ©tĂ© faible) : ce style caractĂ©rise des individus qui n’éprouvent pas le besoin de rechercher de l’intimitĂ© affective avec le partenaire ou de partager des Ă©motions avec lui. Ils insistent sur leur indĂ©pendance vis-Ă -vis du partenaire.


‱ Style romantique prĂ©occupĂ© (Ă©vitement faible et anxiĂ©tĂ© Ă©levĂ©e) : ce style caractĂ©rise des individus trĂšs inquiets concernant leurs relations intimes (peur d’ĂȘtre abandonnĂ©, de ne pas ĂȘtre aimĂ©) et qui cherchent alors Ă  ĂȘtre extrĂȘmement proches et dĂ©pendants de leur partenaire.


‱ Style romantique craintif (Ă©vitement et anxiĂ©tĂ© Ă©levĂ©s) : ce style caractĂ©rise des individus qui cherchent l’affection apportĂ©e par les relations intimes mais ont aussi peur d’ĂȘtre rejetĂ©s par leur partenaire en ce qui concerne leurs demandes affectives. Ils imposent alors souvent une distance Ă  leur partenaire en ne se confiant pas avec une totale sincĂ©ritĂ©, malgrĂ© leur besoin d’entrer en relation et d’ĂȘtre sĂ©curisĂ©s par celui-ci.


Implications dans la vie amoureuse

Il existe de nombreuses consĂ©quences du style d’attachement dans la vie amoureuse des personnes, surtout lorsque les relations dĂ©rapent, semblent toujours se renouveler Ă  l’identique ou conduisent Ă  des ruptures. Il n’est ainsi pas rare d’entendre des femmes verbaliser en entretien qu’elles ont l’impression de toujours « s’embarquer » dans le mĂȘme type de relation, avec des partenaires qui au fond ne leur conviennent pas et ne leur permettent d’accĂ©der ni au bonheur, ni Ă  l’épanouissement, ni Ă  la sĂ©rĂ©nitĂ©. Non pas qu’elles soient Ă  blĂąmer (elles ne peuvent pas ĂȘtre coupables d’aimer !), mais leur style d’attachement peut les conduire Ă  vivre « l’éternel retour du mĂȘme ».

Or, si l’amour est un art constant du compromis, il ne peut pas ĂȘtre envahi par le conflit, l’hostilitĂ© et la colĂšre. Il ne peut pas ĂȘtre nourri par la peur (peur de l’abandon, de ne pas ĂȘtre aimĂ©(e), de ne pas ĂȘtre Ă  la hauteur, peur du dĂ©nigrement et de l’humiliation) et par les comportements dĂ©fensifs d’évitement (Ă©viter le rejet, se dĂ©fendre d’affects douloureux et intenses).


Chez certaines personnes partageant des traits appartenant Ă  la personnalitĂ© borderline (c’est-Ă -dire avec une impulsivitĂ© marquĂ©e, une hyperactivation Ă©motionnelle et des Ă©tats Ă©motionnels facilement changeants), le lien amoureux Ă  l’autre est tellement problĂ©matique qu’il peut aller jusqu’à une alternance dĂ©stabilisante entre idĂ©alisation et dĂ©valorisation du partenaire, ce qui peut conduire Ă  une perturbation de l’identitĂ© mĂȘme. De plus, ce n’est pas parce que le lien amoureux est recherchĂ© qu’il offre pour autant de la satisfaction, de l’apaisement ou des relations de confiance. Un attachement amoureux craintif peut devenir une source de tension et mĂȘme de souffrance psychologique intolĂ©rable. Il peut mobiliser des attitudes de grande rĂ©activitĂ© Ă©motionnelle marquĂ©es par l’agressivitĂ©, la haine ou l’auto-destruction ou des attitudes contradictoires. Dans un rapport pouvant devenir agressif en rĂ©action Ă  la dĂ©tresse, ces patientes tentent continuellement de savoir si elles peuvent ĂȘtre aimĂ©es ou si elles continuent Ă  ĂȘtre considĂ©rĂ©es comme indignes d’amour, des personnes qu’on rejette et qu’on abandonne. Quand les rĂ©ponses ne viennent pas, et pour Ă©viter de sombrer, un mode « protecteur dĂ©tachĂ© » peut se mettre en place : troubles des comportements alimentaires, prise d’alcool ou de drogues, achats compulsifs, conduites Ă  risque. En thĂ©rapie, ces comportements sont souvent prĂ©sentĂ©s comme l’objet principal de la demande de soin alors qu’ils constituent en rĂ©alitĂ© une consĂ©quence. Face Ă  une image de soi brouillĂ©e ou dĂ©valorisĂ©e, un temps de pause est nĂ©cessaire pour amener les patientes Ă  faire la paix avec leur expĂ©rience intĂ©rieure et Ă  l’accueillir avec douceur et compassion pour soi.


La psychothérapie

Pour ces personnes, connaĂźtre leurs modalitĂ©s d’attachement qui opĂšrent Ă  un niveau inconscient est un premier pas thĂ©rapeutique. Cette prise de conscience peut s’initier en utilisant le questionnaire sur les expĂ©riences d’attachement amoureux (QEAA-Traduction francophone de l’ECR). Ce questionnaire a Ă©tĂ© créé par Brennan, Clark et Shaver en 1998, puis traduit et validĂ© en langue française par Lafontaine et Lussier en 2003. Il investigue les attentes, les sentiments et les comportements des sujets Ă  l’égard de leur partenaire amoureux. Ce questionnaire permet de situer la personne sur les dimensions de l’anxiĂ©tĂ© et de l’évitement dans la relation amoureuse. Il permet Ă©galement d’indiquer quel est le style d’attachement privilĂ©giĂ© par la personne. Ce n’est pas tant les chiffres ou catĂ©goriser les personnes qui sont importants que la qualitĂ© des rĂ©ponses. Elle permet d’initier le questionnement et de faire des liens en psychothĂ©rapie. En mettant en route son systĂšme de mentalisation, le patient peut redevenir acteur de sa vie en identifiant et comprenant mieux ses attitudes et ses croyances sur soi et autrui (Ă©tats mentaux) en fonction d’une comprĂ©hension prĂ©alable de ses Ă©tats Ă©motionnels. En se connectant Ă  ses valeurs, c’est-Ă -dire Ă  ce qui est important pour lui, il est Ă©galement mis en capacitĂ© de trouver du sens et Ă  comparer ce qu’il a vĂ©cu jusque-lĂ  dans ses relations amoureuses au regard de la maniĂšre dont il souhaiterait qu’elles se passent.

Au cours d’un travail de thĂšse trĂšs complet Matthieu Reynaud (2011) a observĂ© que les femmes dĂ©primĂ©es qu’il observait mettaient souvent en relation les diffĂ©rents liens d’attachement passĂ©s (parentaux) et prĂ©sents (amoureux et interpersonnels), dans le sens de l’insĂ©curitĂ©. Quel que soit l’objet d’attachement (parents, partenaires amoureux, les autres en gĂ©nĂ©ral), ces femmes rĂ©alisaient que les liens qu’elles Ă©tablissaient habituellement ne cessaient d’ĂȘtre insĂ©curisĂ©s. Ainsi, les relations d’attachement actuelles dĂ©crites comme nĂ©gatives (en particulier les relations amoureuses) rĂ©activaient et prenaient sens au regard de la maniĂšre dont ces femmes se reprĂ©sentaient leurs expĂ©riences parentales passĂ©es. C’est certainement la raison pour laquelle beaucoup de psychologues cliniciens s’accordent Ă  dire qu’il n’est pas possible de comprendre et de traiter le vĂ©cu d’insĂ©curitĂ©, dans les relations d’attachement actuelles (en particulier dans le couple), sans faire rĂ©fĂ©rence et sans faire le lien avec les reprĂ©sentations d’attachement de l’enfance avec les parents. Mettre en lumiĂšre, au cours de la psychothĂ©rapie, les attachements de l’enfance (« les scĂ©narii relationnels de l’enfance ») pourrait ainsi ouvrir sur la perspective d’ajuster, modifier et rendre plus harmonieuses les relations prĂ©sentes, telles qu’elles se dĂ©roulent dans le couple. Cette mise en lien entre attachement passĂ© et prĂ©sent pourrait permettre d’inflĂ©chir le sentiment d’insĂ©curitĂ© actuel en réélaborant les aspects nĂ©gatifs et insĂ©curisĂ©s des liens d’attachement passĂ©s.

Sources

Ainsworth, M. (1989). Attachments beyond infancy. American Psychologist, 4, 709-716.


Bowlby, J. (1978). Attachement et perte. L’attachement (vol 1). Paris: traduction française de Weil, Presses Universitaires de France, le fil rouge.


Bowlby, J. (1978). Attachement et perte. La séparation : angoisse et colÚre (vol 2). Paris: traduction française de Weil, Presses Universitaires de France, le fil rouge.


Bowlby, J. (1984). Attachement et perte. La perte, tristesse et séparation (vol 3). Paris: traduction française de Weil, Presses Universitaires de France, le fil rouge.


Bowlby, J. (1988). A secure base : clinical implications of the attachment therapy. Londres : Routledge.


Brennan, K. A., Clark, C. L., & Shaver, P. R. (1998). Self-report measurement of adult attachment: An integrative overview. In J. A. Simpson & W. S. Rholes (Eds.). Attachment theory and close relationships (pp. 46–76). New York, NY: GuilfordPress.


Lafontaine, M.-F., & Lussier, Y. (2003). Bidimensional structureof attachment in love: Anxiety over abandonment and avoidance of intimacy. Canadian Journal of Behavioural Science, 35, 56–60.


Reynaud, M. (2011). Le modÚle de l'attachement adulte dans la perturbation de la régulation émotionnelle et des liens affectifs des femmes hospitalisées souffrant de dépression (Doctoral dissertation).

Contact

Cabinet N. Boisselier, psychologue

Nathalie Boisselier

Psychologue | Psychothérapeute

Docteure en psychologie

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Centre Thérapeutique de Nice

54, rue Gioffredo - 06000 NICE

Tél. 06 23 38 37 13

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